Cette semaine, j'ai essayé une Munch Mammut 1200 TTS de 1972. Je vous explique pourquoi cette moto est importante.

C'est une légende. La plus grosse de son époque, la plus puissante, la plus exhubérante, la plus impressionnante, la seule à oser intégrer un moteur de voiture dans un cadre de moto. La Munch Mammut, c'est la teutonne qui étonne ! La moto à moteur de voiture, c'est un cas à part : on pourra mentionner les françaises MF 650 (à moteur de Citroën Visa) et BFG 1300 (à moteur de Citroën GS), les brésiliennes Amazonas 1600 (à moteur de VW Coccinelle) ou encore les Boss Hoss et leur V8 Chevrolet, mais la Munch les précède toutes. Et c'est assurément la plus "vraie moto" de toutes, également. Pouvoir en prendre le guidon reste un privilège rare ! 

Munch Mammut, sa vie, son œuvre

Ancien employé de la marque Horex (qui a coulé en 1960), Freidl Munch cherchait à tout prix à concevoir une moto avec un moteur de voiture. Après des contacts peu fructeux chez Volkswagen puis Porsche, il finit par bénéficier d'une oreille attentive chez NSU, d'autant que cette marque fut un constructeur de deux-roues en tous genres (vélos, cyclos, motos). Un accord fut trouvé et la première Munch fut conçue en 1966, avec un moteur quatre cylindres de NSU 1000, puis a rapidement évolué en 1200. Selon les sources, 478 Munch ont été produites, dont 450 1200 TTS ; quelques raretés ont clôt la production, telles les 1200 TTS-E (moteur injecté de 1278 cm3, 104 ch), les 1200 TTS-E Turbo (125 ch), 1400 Turbo (143 ch) voire la rarissime 1800 Titan (150 ch). Attention, quelques machines ont été reconstruites à partir de numéros de série existants. Plus tard (en 2009), Munch a tenté une renaissance avec un moteur d'Opel compressé, de 2 litres de cylindrée et 260 chevaux, et dans un emballage toujours aussi, disons, étonnant... 

Munch Mammut, trois choses qui m'ont fait kiffer

Vu l'âge et le concept de l'engin, on pourrait s'attendre à quelque chose d'horrible à conduire. En fait, il n'en est rien... ou quasiment. Voici donc trois choses qui m'ont fait kiffer au guidon de cette Munch. 

  1. L'ergonomie : étonnament, elle est bien conçue. Guidon pas trop large; selle creusée qui cale bien, réservoir qui laisse de la place aux jambes, c'est plutôt bien conçu. Deux curiosités, cependant : le contacteur à clé est fixé sur le cache latéral gauche, juste au niveau du mollet. Ensuite, elle dispose d'une boîte de vitesses (4) à gauche, mais avec la première en haut et les autres en bas. 
  2. La tenue de route est étonnante : on peut même affirmer que le train avant est impressionnant de franchise vu l'âge et le poids de l'engin. On se sent vite à l'aise au guidon, on entre en virage avec une vraie confiance, et très vite, l'appréhension disparaît. 
  3. Le moteur tracte, évidemment. Certes, avec des critères actuels, on n'est pas forcément impressioné, mais en 1966, il faut se souvenir que les 350 japonaises ou les 650 anglaises faisaient à peine 40 chevaux. Du coup, il allonge quand même bien la foulée (la première monte à 80 km/h et on se retrouve, en quatrième, à 100 km/h à 3000 tr/mn, tranquille), dans un bruit sourd et profond. Le seul vrai défaut, c'est l'embrayage, pas du tout progressif, et qui rend les démarrages comme la conduite en ville assez pénibles. On comprend que sur le tournage de "Mammut", Gérard Depardieu avait des soucis à conduire la moto, et a grillé de l'embrayage ! 

Une Munch Mammut maintenant : combien, comment ?

Attention : les transactions sont rarrissimes et comme la Munch est devenue une légende, on la retrouve désormais sur l'estrade des grandes maisons de vente aux enchères, où elle atteint des valeurs de 120 000 à 150 000 €. Les ventes entre particuliers restent plus autour des 80 000 €. Sa valeur suscite des convoitises : les fausses ou les modèles savamment bricolés commencent à arriver sur le marché. On vérifie l'authenticité par les pièces en Elektron (un alliage spécifique) et pas en polyester, que l'on retrouve sur le tableau de bord, les carters latéraux, la coque arrière, les garde-boue. La Munch a toujours été une moto chère : en 1972, elle valait 32000 F, à mettre en rapport avec les 11600 F demandés par une Honda CB 750 ! 

Quelques chiffres clé : 

  • 4 cylindres, en ligne, 1177 cm3, 75 x 66,6 mm
  • 2 carburateurs Weber double corps, 40 mm
  • 88 ch à 6000 tr/mn
  • 115 Nm à 2800 tr/mn
  • 295 kilos à sec
  • 210 km/h chrono