Cette semaine, j'ai essayé une Laverda 1000 RGS de 1983. Je vous explique pourquoi cette moto est importante.

Dans l'univers de la moto de collection, la marque Laverda est un peu à part. Les fans de cette firme italienne, mythique, restent éplorés devant le destin magnique de cette marque qui, a leurs yeux, aurait du être l'élue parmi les élues ! Pensez-donc : outre les succès de la 750 en compétition (Endurance, notamment), au début des années 70, Laverda a aussi défrayé la chronique avec une 1000 V6, hélas vite interdite par une évoution des réglements techniques. Côté moto de série, les 750 SF restent au firmament de la production, et les 1000 trois cylindres ne laissent pas leur part du gâteau. J'ai donc essayé une 1000 RGS de 1983, une belle et grande routière... 

Laverda 1000 RGS, sa vie, son oeuvre

Après avoir produit des motocyclettes de 1947 à 1966, la branche "deux-roues" de la société familiale Laverda (spécialisée depuis 1872 dans le matériel agricole puis les tracteurs - on ne rigole pas) décide de passer à la vitesse supérieure. Or, qu'est-ce qui est à la mode au milieu des années 60 ? Les vertical twin britanniques, pardi ! Laverda travaille donc sur un bicylindre 650, qui deviendra 750 en 1970. Quelques années plus tard, sans trop se compliquer la vie, Laverda rajoute un cylindre à tout le monde : cela donnera des modèles trois cylindres en 1000 et 1200, ces deux machines reprenant, respectivement, les pistons de la 650 et de la 750. Dit comme cela, on a l'air de se moquer, mais en fait, pas du tout : car, rappelez-vous, Laverda est d'abord un spécialiste de l'agricole. Et en agriculture, on fait des engins solides et qui durent. C'est ainsi que la fiabilité et la qualité de construction seront à citer en exemple (par pudeur, on n'inclut pas dans cette démonstration les 650 et 750 Formula de la fin des années 90) , tout est solide et surdimensionné sur ces engins ; à titre d'exemple, rien que le bloc moteur d'une 1000 pèse 90 kilos... 

Concernant les trois cylindres 1000 et 1200, ce sont là des machines imposantes, robustes, pleines de caractère. Encore qu'il faut distinguer deux périodes : les premières ont le moteur calé à 180°, il est plus rugueux et plus onctueux que la seconde génération, calée à 120°. C'est celui ci qui anime notre RGS 1000. Cette moto mérite vraiment qu'on l'observe dans tous les détails : le phare provient d'une Fiat 124, le tableau de bord est celui d'une Autobianchi A112, la trappe à essence est calée dans l'avant du carénage, sur le côté droit (et c'est une très mauvaise idée, car la jauge à essence est nulle et ça refoule quand on refait le plein). Sous le généreux dosseret, la selle est bicolore, avec une bande rouge. 

La RGS a été produite de 1983 à 1989, quasiment sans modifications d'importance : on ne peut noter que des aléas de fournisseurs et quelques périphériques qui changent d'un millésime à l'autre. Sinon, le succès commercial fut relativement mitigé, et Laverda a tenté de dynamiser la gamme avec une RGA (équipement moindre, petit tête de fourche) et a fait quelques versions "Executive" (déflecteurs, valises), principalement vendues en Australie et aux USA. Pour l'anecdote, ce modèle était d'abord destiné à la police syrienne... qui ne valida pas la commande. Enfin, une version RGS Corsa, plus affutée (95 ch) a été produite de 1984 à 1986. 

Laverda 1000 RGS : trois choses qui m'ont fait kiffer

Voici une moto imposante : plus de 1500 mm d'empattement, près de 250 kilos à sec. Il faut un peu de poigne et le gabarit qui va bien pour se sentir parfaitement à l'aise à son guidon. Voici donc ce que j'en ai retenu. 

  • Le moteur a une belle allonge, une belle sonorité, et devient plus expressif dès que l'on passe la barre des 5000 tr/mn. 
  • La tenue de route est stable, mais l'engin n'est pas agile du tout. Son truc, ce sont les courbes rapides, bien revêtues, les longs trajets, où le charme de sa mécanique atypique peut réellement s'exprimer. 
  • Le charme de cette machine est unique. Marque disparue, design étonnant, proportions curieuses (la hauteur de l'avant, l'angle de chasse...), équipement haut de gamme, il se passe quelque chose dès que l'on se retrouve à leur guidon. Le niveau de performances reste encore très actuel (80 ch, 80 Nm de couple) et avec cette machine, on n'a qu'une envie, c'est de tailler la route. 

Une Laverda 1000 RGS maintenant : combien, comment...

Une RGS 1000, c'est une machine rare et élististe et ça l'a toujours été. En 1983, elle valait déjà 50445 F (à comparer avec les 44300 F demandés par une BMW R 100 RT,  déjà pas franchement bon marché - une Kawasaki Z 1100 GT, à cardan, valait alors 28900 F !). Du coup, il faut accepter une cote encore élevée pour une RGS 1000 : pas moins de 10 000 € pour un bel exemplaire. Problème : les pièces deviennent rares (carrosserie, notamment), les motos existantes roulent de moins en moins et les transactions sont vraiment peu courantes. Mais si vous en trouvez une belle, ça vaut le coup car la moto est vraiment très attachante. 

Quelques chiffres clé : 

  • 3 cylindres, en ligne, 981 cm3, 75 x 74 mm
  • 3 carburateurs Dell'Orto, 32 mm
  • 80 ch à 8000 tr/mn
  • 80 Nm à 7000 tr/mn
  • 248 kilos à sec
  • 220 km/h chrono